Art et Culture

Journées européennes du patrimoine 2023

Cette année, les Journées européennes du patrimoine célèbrent le patrimoine vivant. Au Collège des Bernardins la compagnie "Les Tréteaux du monde" viendra représenter Bernard de Clairvaux et rendre hommage à celui dont l’engagement extrême interpelle et peut nourrir le monde à venir. Entretien avec son fondateur, Djamel Guesmi.

Publié le
11/9/23
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A quoi fait écho le nom de votre compagnie, "Les Tréteaux du monde" ?

Le monde ne s’est pas construit sur du sable. René Rémond, historien, disait :« comprendre son temps est impossible à qui ignore tout du passé ; être un contemporain c’est aussi avoir conscience des héritages consentis ou contestés ». Vivre au présent nécessite de connaître son passé. De qui sommes-nous les héritiers ? Qui peut nous aider à penser demain ? Le répertoire des Tréteaux du monde est essentiellement constitué de drames sacrés qui évoquent la quête de personnages atypiques. Saint François, Bernard de Clairvaux, Saint Martin de Tour, Saint Gérard de Corbie ….
Ce sont eux nos tréteaux. Parfois oubliés, ils ont pourtant encore beaucoup à nous apprendre aujourd’hui.  

Saint François, Bernard de Clairvaux, Saint Martin de Tour, Saint Gérard de Corbie, Saint Dominique...Vous êtes singulièrement attaché aux grandes figures engagées. Pourquoi cet attrait ?

Ces figures emblématiques de la chrétienté nourrissent ma quête personnelle. Entièrement dévouées à leur foi, elles ont toutes vécu des situations extrêmes. François d’Assise plonge dans une pauvreté absolue qui lui fait embrasser toute la création jusqu’aux animaux les plus humbles ; Saint Dominique, fondateur de l’ordre des prêcheurs (les dominicains), invite à s’instruire sans relâche ; Bernard que nous représenterons lors des Journées européennes du patrimoine au Collège des Bernardins, veut parvenir à l’ascèse monastique la plus rude, au dépouillement extrême. Revenir à l’essentiel, s’éloigner de la luxure. Un message inspirant, encore aujourd’hui… Ce sont toutes des figures « en recherche ».

 

Cette « recherche » inspire aussi votre mise en scène et votre jeu. Vous jouez sans artifice pour dévoiler ce qu’il y a de plus grand…

Mon art, je le vis comme une quête, un chemin de vie qui vient nourrir mes propres attentes. Je me suis façonné à travers lui. Le sens est toujours présent, mais il faut aller le chercher.
Revenir à l’essentiel, s’éloigner de la luxure. Un message inspirant, encore aujourd’hui…

Cette recherche je l’expose sans artifice. Lorsqu’on se produit sur des sites historiques, il ne faut pas chercher à créer un théâtre. Il faut rester humble et se laisser saisir, se laisser accueillir. Je n’ai d’autre décor que celui du lieu : le texte et les corps des comédiens parlent à la conscience du public. La seule chose que nous osons c’est le gradin, pour l’acoustique et la visibilité.

Mais « jouer le sacré »,« jouer la foi » c’est aussi pour moi une forme de service.
Je suis au service d’une œuvre, au service du sacré, au service du mystère ; j’ai porté ma foi sur la place publique. 

 

Vous parlez de cela comme d’une vocation…

Toucher aux choses sacrées nécessite des sacrifices et un don de soi. C’est parfois un combat. C’est dur. J’ai pris conscience de ce que pouvait signifier« donner », j’ai pris conscience de la dualité du monde.
Cette recherche de Dieu c’est à travers mon art que je l’honore.
La foi peut faire peur. Passer par l’art théâtral peut permettre de désamorcer cette peur, mais ce n’est pas sans difficulté. Un jour je présentais à un ami qui dirige une maison culturelle dans l’Isère la plaquette de présentation de ma compagnie. En couverture le pape et l’Abbé Pierre. En guise de commentaire, mon ami me confie qu’avec une telle couverture je ne pourrai jamais pénétrer le circuit théâtral classique. Ce n’est pas grave, ce n’est pas « ma quête ». 
 

« Chercher et se laisser accueillir », ce sont vos mots… Il y a 15 ans Benoît XVI s’adressant au monde de la culture venu l’écouter au Collège des Bernardins soulignait l’importance de lieux dédiés à la quête de Dieu : « chercher Dieu et se laisser trouver par Lui : cela n’est pas moins nécessaire aujourd’hui que par le passé ».

La scénographie minimale c’est aussi une façon de retrouver le sens premier de l’édifice dans lequel nous nous produisons : la prière, la recherche de Dieu. Personnellement, cette recherche de Dieu c’est à travers mon art que je l’honore. C’est le travail d’une vie au service du mystère et du dévoilement.
« Il en est ainsi de la foi : si elle n'a pas les œuvres, elle est morte en elle-même. Mais quelqu'un dira : Toi, tu as la foi ; et moi, j'ai les œuvres. Montre-moi ta foi sans les œuvres, et moi, je te montrerai la foi par mes œuvres… Jacques 2 :17,18
 « C’est par mes œuvres que je te montrerai la foi », cette épitre de Saint Jacques je l’éprouve quotidiennement. 
 

Nous aurions aimé en savoir davantage sur votre parcours….

Il est toujours très difficile de parler de soi, mais j’y travaille (rire)… En février prochain je publie le récit de ma vie aux éditions DDB : je vous donne donc rendez-vous en février en librairie !

Merci Monsieur Guesmi, à suivre donc… En attendant, nous nous réjouissons de vous retrouver au Collège des Bernardins les 16 et 17 septembre lors des Journées européennes du patrimoine.

 

 

 

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