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Pôle de recherche

Politique et Religions

CONSTRUCTION NATIONALE ET RELIGION EN MÉDITERRANÉE

Ce séminaire Construction nationale et religion en Méditerranée propose une réflexion sur la complexité des liens entre nations et religions dans l’espace méditerranéen. La Méditerranée se présente comme un véritable carrefour de civilisations, lieu de rencontres culturelles et d’échanges commerciaux, mais aussi comme un espace traversé par des tensions persistantes où la religion a souvent joué un rôle déterminant dans la construction nationale. Dans cet ensemble fragmenté, marqué par l’héritage des empires ottoman, byzantin ou colonial, par les expériences de domination et les luttes d’indépendance, la relation entre identité nationale et appartenance religieuse demeure une question centrale. On peut alors s’interroger : comment les traditions religieuses, à la fois sources de cohésion symbolique et facteurs de division, contribuent-elles à façonner, contester ou réinventer les nations méditerranéennes ?

L’examen comparé des processus de laïcisation et de sécularisation met en évidence des trajectoires divergentes. Certains États, comme la France et ses anciennes colonies, ont privilégié une stricte neutralité institutionnelle, tandis que d’autres ont ancré leur légitimité politique dans des références religieuses explicites. Ces choix contrastés ont engendré des tensions durables, oscillant entre universalisme revendiqué et affirmation particulariste, débouchant parfois sur des guerres civiles ou sur des régimes autoritaires. L’étude couvre l’ensemble du bassin méditerranéen, du Maghreb au Proche-Orient, en incluant Israël et la Palestine.

Ce séminaire propose une réflexion sur la complexité des liens entre nations et religions dans l’espace méditerranéen. L’appartenance confessionnelle ne peut être réduite à une identité immuable ni à une simple variable politique : elle s’inscrit au cœur des rapports de pouvoir, des récits collectifs et des projets d’avenir. Comprendre ces dynamiques, c’est interroger non seulement les fragilités des États méditerranéens, mais aussi leur capacité à transformer la diversité religieuse en ressource plutôt qu’en menace.

LES AXES DE LA RECHERCHE :

- Analyse comparative des processus de laïcisation, de sécularisation et des tensions religieuses dans les projets nationaux méditerranéens.

Cet axe permet de mettre en évidence la diversité des parcours étatiques et les équilibres variables entre neutralité institutionnelle et recours au religieux pour asseoir l’autorité politique, tout en soulignant les tensions identitaires persistantes.

- Étude des relations entre religion et construction nationale au Maghreb, à travers l’Algérie, le Maroc et la Tunisie.

Ces pays illustrent des usages très différents de l’islam, tantôt comme outil de légitimation monarchique, tantôt comme force contestataire ou objet de répression, révélant la complexité des rapports entre foi et consolidation nationale.

- Examen de la formation de l’identité nationale libanaise, à l’intersection du Levant et du monde arabe.

Le Liban montre combien il est difficile de bâtir une nation sur un équilibre confessionnel rigide, ce qui entraîne des crises et des conflits internes, et questionne la possibilité d’une identité nationale qui dépasse les appartenances religieuses.

- Exploration des interactions entre minorités religieuses et appartenances nationales dans le Proche-Orient et le Maghreb.

Kurdes, Druzes, chrétiens d’Orient ou minorités maghrébines illustrent les tensions entre inclusion et marginalisation, ainsi que les stratégies d’instrumentalisation politique, révélant les fragilités des projets nationaux face à la diversité.

- Analyse des liens entre nation, religion et minorités dans le contexte spécifique d’Israël.

Israël constitue un exemple unique où identité nationale et religion sont étroitement liées, plaçant les minorités dans une situation d’altérité, et questionnant la compatibilité entre un projet national exclusif et la pluralité confessionnelle.

- Étude du rôle des Églises chrétiennes dans la défense de l’identité nationale palestinienne.

Par leurs discours et leur engagement, ces institutions apportent une dimension spirituelle et symbolique à la cause palestinienne, montrant comment la religion peut soutenir la construction d’une identité nationale en quête de reconnaissance.

- Analyse du national-conservatisme et de ses liens avec les traditions religieuses, à travers Israël, le catholicisme et l’orthodoxie.

Cet axe met en lumière l’instrumentalisation de la foi pour légitimer des modèles sociaux conservateurs et exclusifs, et pour renforcer des visions politiques identitaires.

SINGULARITÉ DE LA RECHERCHE

Ce séminaire se distingue par son approche originale, qui articule de façon cohérente les dimensions historiques, politiques, sociales et culturelles de la relation entre religion et construction nationale en Méditerranée. Plutôt que de se concentrer uniquement sur l’État ou sur la religion, il propose une lecture croisée, révélant comment ces deux sphères s’influencent mutuellement et génèrent des interactions complexes ainsi que des tensions multiples.

Un autre point saillant de ce séminaire réside dans son angle comparatif, qui couvre l’ensemble du bassin méditerranéen, du Maghreb au Proche-Orient, en incluant Israël et la Palestine. Cette démarche permet d’identifier à la fois des tendances communes et des spécificités locales dans les processus de laïcisation, de sécularisation, de nationalisme religieux et de gestion des minorités. Elle met en lumière les différentes stratégies par lesquelles le religieux peut être mobilisé pour légitimer le pouvoir ou façonner les identités collectives.

Le séminaire se caractérise également par sa pluridisciplinarité, combinant histoire, sciences politiques, droit, sociologie et études littéraires. L’analyse des textes juridiques et du rôle des juges, l’étude des récits littéraires et des mémoires minoritaires, ainsi que l’examen des discours religieux dans les conflits, permettent de comprendre comment la religion peut agir à la fois comme facteur de cohésion et moteur de division. Cette approche offre une lecture globale et nuancée des relations entre foi, pouvoir et identité nationale.

Ce projet se distingue enfin par sa capacité à relier les enjeux historiques aux réalités contemporaines. Il ne se limite pas à l’étude des héritages passés, mais explore également comment la religion continue de structurer les identités nationales, d’influencer les politiques publiques et d’alimenter les conflits ou les compromis sociaux. En fournissant des outils d’analyse pour considérer la diversité religieuse comme une ressource plutôt qu’un obstacle, le séminaire ouvre de nouvelles perspectives pour la compréhension et la gestion des sociétés méditerranéennes actuelles.

PORTÉE EUROPÉENNE ET INTERNATIONALE

Le séminaire présente une portée européenne notable, car il examine les liens historiques et contemporains entre religion et construction nationale au sein des États méditerranéens, dont plusieurs ont été profondément marqués par l’histoire européenne, notamment à travers la colonisation ou les influences politiques et juridiques. L’analyse comparative des processus de laïcisation et de sécularisation, ainsi que l’étude de modèles nationaux variés, permettent de mieux comprendre des problématiques partagées par les sociétés européennes, telles que la gestion de la pluralité religieuse, l’intégration des minorités et les tensions autour de l’identité collective. L’exploration des dynamiques du national-conservatisme, des évolutions juridiques et des débats identitaires méditerranéens fournit ainsi des clés d’interprétation pertinentes pour des contextes européens actuels marqués par les migrations, la diversité religieuse et la recomposition des identités sociales.

La dimension internationale du séminaire réside dans sa capacité à dépasser les frontières régionales pour analyser des phénomènes transnationaux. Les mobilisations religieuses, les mouvements minoritaires et les conflits liés à la nation dans le Proche-Orient, en Israël, en Palestine ou au Maghreb montrent comment les enjeux religieux et nationaux s’inscrivent dans des dynamiques globales de pouvoir, de diplomatie et de mémoire. L’étude de la littérature francophone minoritaire et des récits littéraires, ainsi que l’analyse du rôle des juges et du droit, offre une perspective précieuse sur les stratégies de médiation et de reconnaissance de la diversité. Ce cadre analytique constitue un outil utile pour les chercheurs et décideurs internationaux confrontés à des sociétés multiculturelles et multi-confessionnelles.

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Département
Politique et Religions
Période
2026 - 2027
statut
2026 - 2027
EN COURS
terminé
En partenariat avec
Le programme

27 mars 2026

Laïcité, sécularisation et conflits religieux dans les projets nationaux méditerranéens. Analyse comparée historique et politique

Responsables de séance : Alessandro Ferrari, professeur de droit et religion, Université d’Insubria, Côme, Italie et Valentine Zuber, professeure, Université PSL ; directrice d’études, École Pratique des Hautes Études, titulaire de la chaire de « Histoire comparée des laïcités (XVIIIe-XXIe siècles)

22 mai 2026

Religion et dynamique nationale au Maghreb (Algérie, Maroc et Tunisie)

Responsable de séance : Mohammed Mouaqit, professeur, Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales, Université Hassan II, Casablanca

19 juin 2026

La construction de l’identité nationale libanaise, entre sham et monde arabe

Responsable de séance : Amin Elias, maître de conférences à la Faculté de Pédagogie, Université libanaise, Liban

18 septembre 2026

Minorités religieuses et appartenances nationales: intégration, exclusion, instrumentalisation (Proche et Moyen Orient) Kurdes, Druzes et chrétiens d’Orient. Minorités au Maghreb

Responsable de séance : Imad Khillo, maître de conférences de droit public, Sciences Po Grenoble ; chercheur associé à l'IREMMO-Institut de Recherche et d'Études Méditerranée Moyen-Orient

13 novembre 2026

Nations, religions et minorités religieuses en Israël

Responsable de séance : Stéphanie Laithier, chargée d’études et de recherche, Institut d’études des religions et de la laïcité (IREL), EPHE (PSL)

11 décembre 2026

Défense de la nation palestinienne dans les Églises chrétiennes. (Thèse de Katarina Bandini, Karthala)

Responsables de séance : Blandine Chélini-Pont, professeure d’histoire contemporaine et relations internationales, Aix-Marseille Université et Rémi Caucanas, chercheur associé, Institut pontifical d’études arabes et d’islamologie (PISAI, Rome) et Institut de Recherches et d’Études sur le Monde Arabo-Musulman (IREMAM, Aix-en-Provence)

15 janvier 2027

National conservatisme et religions (Israël, catholiques et orthodoxes)

Responsable de séance : Blandine Chélini-Pont, professeure d’histoire contemporaine et relations internationales, Aix-Marseille Université

12 février 2027

Les rôles du juge dans la construction du droit national en Méditerranée

Responsable de séance : Jinan Limam, maître-assistante en droit public, Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales, Université de Carthage, Tunis

19 mars 2027

Mémoires et récits minoritaires dans la littérature francophone méditerranéenne Amin Maalouf, Leila Slimani, Tahar Ben Jelloun, etc

Responsable de séance : Rémi Caucanas, chercheur associé, Institut pontifical d’études arabes et d’islamologie (PISAI, Rome) et Institut de Recherches et d’Études sur le Monde Arabo-Musulman (IREMAM, Aix-en-Provence)

23 avril 2027

Motivation religieuse dans les conflits autour de la nation (Sionisme chrétien… Frères musulmans)

Responsable de séance : Dominique Avon, directeur d’études, EPHE-PSL ; directeur de l’Institut d'études de l'Islam et des sociétés du monde musulman (IISSM)

 

L'équipe de recherche

Dominique Avon, directeur d’études, EPHE-PSL ; directeur de l’Institut d'études de l'Islam et des sociétés du monde musulman(IISSM)

Augustin Bourgue, théologien, codirecteur du département Politique et religions du Collège des Bernardins

Rémi Caucanas, chercheur associé, Institut pontifical d’études arabes et d’islamologie, PISAI, Rome et Institut de Recherches et d’Études sur le Monde Arabo-Musulman, IREMAM, Aix-en-Provence

Blandine Chelini-Pont, professeure d’histoire contemporaine et relations internationales, Aix-Marseille Université

Amin Elias, maître de conférences, Faculté de Pédagogie, Université libanaise

Wahid Ferchichi, professeur en droit public, Université de Carthage ; doyen, Faculté des sciences juridiques et sociales, Université de Carthage, Tunis

Alessandro Ferrari, professeur de droit et religion, Université d’Insubria, Côme, Italie 

Imad Khillo, maître de conférences de droit public à Sciences Po Grenoble, chercheur associé à l'IREMMO-Institut de Recherche et d'Études Méditerranée Moyen-Orient

Stéphanie Laithier, chargée d’études et de recherche, Institut d’études des religions et de la laïcité (IREL), EPHE (PSL)

Jinan Liman, maître-assistante en droit public, Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales, Tunis

Mohamed Mouagit, professeur, Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales, Université Hassan II, Casablanca

Abderrazak Sayadi, professeur de l'enseignement supérieur, Faculté des lettres et sciences humaines de Kairouan, Tunisie

Valentine Zuber, professeur, Université PSL; directrice d'études à l'EPHE, titulaire de la chaire de Histoire comparée des laïcités (XVIIIe-XXIe siècles)